Interview de Bruno Rousset, Président du Conseil de l'ISFA

Pour quelles raisons avez-vous accepté de prendre la présidence du conseil de l’ISFA ? Avez-vous des objectifs qui vous tiennent particulièrement à cœur ?

Si j’ai accepté de prendre cette présidence, c‘est tout d’abord parce que Jean-Claude AUGROS, pour qui j’ai un immense respect, me l’a demandé. Jean-Claude est un entrepreneur universitaire qui a su, à la suite de Philippe PICARD et de Daniel SERANT, poursuivre l’élan des réformes de l’institution entamées depuis maintenant un peu plus de 20 ans. L’ISFA est une marque unique et prestigieuse dans son univers, qui ne saurait laisser indifférent l’entrepreneur investisseur que je suis, dont le métier consiste à faire grandir les entreprises.

L’ISFA peut grandir en augmentant progressivement le nombre de ses diplômés dont nous avons tant besoin d’une part, en élargissant le kaléidoscope de ses compétences d’autre part, à l’instar de ce qu’elle a initié dans le Master SAFIR en matière de risk management, naturellement dérivé de l’actuariat. Enfin, l’Ecole, forte de ses premières expériences à l’étranger, doit aussi poursuivre son rayonnement au-delà des frontières. C’est une nécessité dans un monde plus globalisé et un enrichissement culturel qui sera de plus en plus prisé des entreprises d’assurances.

Mon souhait est que des objectifs ambitieux sur ces trois thématiques puissent être fixés dans un plan moyen terme que le management se propose de bâtir.

Que pensez- vous de la volonté du sénateur-maire de Lyon, Gérard Collomb de faire de Lyon une capitale européenne de l’assurance ?

Notre Maire nourrit de nombreuses ambitions de développement pour sa ville. Je pense que Lyon, cité d’entrepreneurs, a beaucoup d’atouts pour relever ce challenge : une histoire sociale exemplaire qui a vu naître de nombreuses mutuelles et institutions de prévoyance au cours des deux siècles écoulés, la création de l’ISFA dès 1930, la présence de tous les cursus possibles de l’assurance grâce à l’Institut des Assurances (Université LYON 2), l’IFPASS et le CNAM.

LYON compte aussi quelques belles institutions et mutuelles qui ont conservé leur siège dans sa communauté urbaine.

L’histoire d’APRIL montre qu’il est possible, même en province, de donner naissance à la première société de courtage de France. Il suffit d’être ambitieux…

Avez-vous un thème auquel vous souhaiteriez sensibiliser les étudiants des formations de l’ISFA ?

J’entrevois deux axes sur lesquels l’ISFA pourrait prendre une longueur d’avance. Le premier qui me tient particulièrement à cœur est celui de la formation philosophique et morale des étudiants. On voit combien la formule de Rabelais « Science sans conscience n’est que ruine de l’âme » est d’une criante actualité. La finance se dote d’outils de plus en plus sophistiqués sans s’interroger sur les finalités et la durabilité de ses actions. Sans conscience morale, ces outils peuvent se transformer en véritables bombes nucléaires dont les dégâts s’étalent sous nos yeux depuis 2008.

Le deuxième axe lié au premier a trait à la gestion des risques. C’est un sujet majeur dans lequel l’actuaire est plus que légitime.

L’entreprise moderne est exposée à une montée en puissance de risques nouveaux : destruction des systèmes d’information, fraudes, atteinte à la propriété industrielle, à l’image, conformité règlementaire… la présence d’experts en statistiques et probabilités mais connaissant également les rouages de l’entreprise est une réelle plus-value pour elle. J’appelle de mes vœux l’inclusion, dans le cursus de l’Ecole, de formations plus générales sur le management et la connaissance des rouages de l’entreprise.

Le slogan de l’ISFA est « Gérer les risques autrement afin de contribuer à la stabilité financière, à l’équilibre social et au développement durable », comment pensez-vous agir en ce sens, en tant que PDG d’APRIL et Président du conseil de l’ISFA ?

En tant que Président d’APRIL mais également d’EVOLEM, mon fonds de capital investissement, je me suis donné des règles qui satisfont à ces trois objectifs. Les critères que nous retenons à l’attention des entreprises dont EVOLEM est actionnaire sont au nombre de cinq : la création d’emploi, le dialogue social, la prise en considération des employés comme première richesse de l’entreprise, le respect et la communauté d’intérêt avec toutes les autres parties prenantes (clients, fournisseurs, actionnaires, environnement et collectivité publique), et un mode de gouvernance clair et efficace.

Quant à ma mission de Président de l’ISFA, l’éthique étant une et indissociable, je la conçois à l’identique. On ne véhicule pas des idées par l’habileté du discours mais par l’exemple. L’ISFA doit être une référence auprès de ses professeurs, ses étudiants et les futurs employeurs de ses étudiants. Cette culture de la durée, de la « mission » que remplissent les actuaires ISFA dans leur environnement est un élément supplémentaire de valorisation des diplômés que produit notre Ecole. Je fais souvent le parallèle avec les Compagnons du Devoir qui allient harmonieusement le savoir-faire et le savoir être. Pour le client, cette dualité du Compagnon est un gage de confiance qu’il est prêt à monnayer.

Toutes ces évolutions sont portées au quotidien par la Direction et le corps professoral de l’ISFA, avec un engagement hors normes.

Interview de Bruno Rousset réalisé, pour la revue ISFA spéciale forum 2011

Publié le 23 octobre 2015